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Faut-il tout arrêter à cause du coronavirus ?

13 mai 2020

Faut-il tout arrêter à cause du coronavirus ?

 

Probablement pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, de nombreux pays, dont la France, ont choisi de sacrifier leur économie pour éviter un nombre jugé trop élevé de morts dues au Coronavirus.

Politiquement, le gouvernement français était obligé de réagir face à la propagation de l’épidémie pour éviter des hôpitaux débordés, des malades non soignés et des images de milliers de cercueils. Le confinement décidé le 16 mars n’évite pas toutes les morts, mais elles se compteront en quelques dizaines de milliers et pas en centaines de milliers.

La décision de confinement, considérée comme tout à fait improbable en France en Janvier, a été bien acceptée en mars. Alors que l’on mesure mieux les effets du confinement et qu’il est peut-être appelé à persister sous des formes plus ou moins sévères, on peut se poser deux questions :

– Pourquoi refuse-t-on d’accepter les risques de mort par le Coronavirus alors que l’on accepte des risques plus graves dans la vie courante, par exemple avec le tabac, l’alcool ou la voiture ?

– Quelles sont les conséquences économiques du confinement ?

Sur la première question, la mortalité du Covid-19 n’est pas connue avec précision, mais les médecins s’accordent pour dire que 98 % des personnes diagnostiquées en réchappent. On sait que la maladie est bénigne dans 85 % des cas et que beaucoup de malades ne présentent aucun symptôme et ne sont pas diagnostiqués. Le taux de mortalité réel est plutôt de 0,6 % ou 0,7 %. En l’absence de mesures de confinement, on aurait pu avoir en France 300 000 morts à ajouter aux 600 000 morts que la France constate en moyenne chaque année. Avec le confinement, les experts espèrent diviser par 10 ces prévisions.

L’acceptation générale du confinement traduit notre refus des risques de mort par le Coronavirus. Nous acceptons assez facilement des risques quand c’est nous qui les décidons, mais nous ne supportons pas les risques qui nous sont imposés par une cause extérieure mal connue.

Dans l’histoire de l’humanité, la mort était un phénomène qui frappait au hasard tous les individus.  Guerres, épidémies, famines étaient les principales causes de mort et les hommes ne pouvaient que les subir. Au cours du XXème siècle, l’évolution de la médecine a entraîné une forte diminution des morts imputables à des causes extérieures et, pour beaucoup d’hommes et de femmes, la mort est la conséquence de leur mode de vie et des risques qu’ils ont pris.

Les maladies infectieuses, celles qui sont dues à des agents extérieurs (microbes, bactéries ou virus), ne représentent que 1,8 % des décès. Plus de la moitié des décès sont dus aux cancers, aux maladies cardio-vasculaires au diabète etc. Ce sont des maladies causées en partie par des facteurs génétiques, mais aussi pour beaucoup par le mode de vie que nous avons choisi.

Nous acceptons donc habituellement que plus de 300 000 morts par an soient causées par des risques que nous avons acceptés en vivant sans suivre les conseils de la médecine. Dans ces conditions, il n’est peut-être pas très logique que la société française décide d’arrêter ses activités pour éviter un nombre de morts très inférieur. C’est d’autant moins raisonnable que cela fait augmenter la mortalité ordinaire. Combien de cancers, combien d’infarctus ne sont pas soignés à temps par crainte d’aller dans les hôpitaux ?

Il faut maintenant surmonter l’émotion causée par l’arrivée de l’épidémie et se poser la question des conséquences économiques du confinement et de l’arrêt des activités. C’est indispensable si l’épidémie continue et si l’on ne trouve pas de vaccin. Si l’économie s’arrêtait durablement ou même si elle fonctionnait au ralenti, comment pourraient fonctionner nos hôpitaux ?

Les conséquences financières sont d ’ores et déjà très importantes. Le budget 2020 de la France était prévu avec 251 milliards € de ressources et 346 milliards € de dépenses, soit déjà un déficit de 93 milliards €. Pour financer les dépenses liées à la crise, le gouvernement a fait passer deux lois de finance rectificatives qui ont augmenté le déficit prévisionnel de 93 à 186 milliards €. Avec le chômage partiel, l’État prend en charge à peu près la moitié des salariés français, mais ses dépenses sont financées à 43 % par la dette. La France qui, comme tous les pays européens, s’était engagée à limiter son endettement à 60 % de son PIB va dépasser 120 % à la fin de l’année.

Malgré ces dépenses illimitées, financées en fait par la planche à billets, le PIB de la France va diminuer en 2020 et le chômage va fortement augmenter. Des secteurs entiers, l’hôtellerie, la restauration, le tourisme, la culture, le sport sont sinistrés et ne pourront pas récupérer le chiffre d’affaires perdu depuis le 16 mars. Il va falloir consacrer des milliards d’€ au sauvetage de nos entreprises du secteur des transports : Airbus, Air France, SNCF, RATP…

La crise économique va avoir des conséquences si graves à terme qu’il est temps de les prendre en compte elles aussi. Nous ne devrions pas choisir entre le risque sanitaire et le risque économique, mais essayer de les traiter en même temps.

On doit mettre en œuvre toute la batterie de mesures de lutte contre la propagation de l’épidémie : port du masque, tests, distanciation sociale, isolement des cas confirmés ou suspects, etc. mais sans mettre à l’arrêt les transports et l’économie. Il faut se rappeler en permanence que la maladie est bénigne dans 85 % des cas et que, dans la vie, le risque zéro n’existe pas.

Les maires de station balnéaire disposant de plages immenses ont raison de s’étonner de l’interdiction d’accès à ces espaces naturels où le risque est, à l’évidence, extrêmement faible. Les Français, qui vont se retrouver au chômage, souhaiterons certainement que l’on parle des conséquences économiques en même temps que des risques sanitaires.

Dans notre société ou toutes les décisions peuvent être attaquées en justice, le redémarrage nécessaire de l’économie suppose que l’on prévoit une protection juridique de nos maires et de nos chefs d’entreprises. Un maire ou un chef d’entreprise, qui a appliqué normalement les mesures barrières préconisées par le gouvernement, ne devrait pas pouvoir être attaqué au pénal, même si on constate un cas de contagion par le coronavirus.

Le Coronavirus va probablement continuer à faire des morts pendant des mois, mais nous ne sortirons de la crise actuelle que si nous luttons contre le coronavirus sans arrêter notre économie.

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